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Bonjour,
Lorsqu’un enfant a un diagnostic de tempérament cyclothymique, quels peuvent être ses pronostics d’avenir ?
Reste au niveau du tempérament, passe au trouble cyclothymique, passe à une bipolarité 2 voire 1 ?
Qu’est-ce qui pourrait induire un changement de diagnostic ?
Merci de votre aide

Dr Elie Hantouche – Ven 19 Fév 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

Question : DEVENIR D’UN TEMPERAMENT CYCLOTHYMIQUE

Le trouble cyclothymique n’est qu’une accentuation du tempérament cyclothymique.

Ce qui distingue un Trouble Cyclo d’un Temp Cyclo :
– amplitude des oscillations de l’humeur et des niveaux d’énergie et activité
– conséquences péjoratives sur le fonctionnement social, scolaire et familial

Par rapport aux personnes à tempérament stable ou non cyclothymique, les personnes avec un Temp. Cyclo sont plus à risque de développer un trouble bipolaire ou trouble cyclothymique.

Pour l’instant, on ne dispose pas de chiffre exact sur le risque relatif.
En revanche, on sait que certains facteurs contribuent à l’accentuation du tempérament cyclo chez les jeunes
– Abus de substances (alcool, cannabis, stimulants, café…)
– passage pubertaire
– rupture des rythmes (veiller tard, nuits courtes…)
– mauvaise diète alimentaire (excès de viande rouge, hydrates de carbone…)
– dépendance aux jeux vidéos, Internet…
– ruptures sentimentales, deuils, divorce des parents…

Il est en crise alors que la dose a été augmentée.

Bonjour, c’est à n’y rien comprendre, mon fils était sous Micropakine 250
et il était régulé depuis 9 mois, hormis une irritabilité constante, et des soucis de mémorisation.

Pour pallier à ces inconvéniants, on est passé à 1 dépakine 500. Mais voilà depuis ses humeurs ont repris fortement alors que c’est exactement la même composition que la Micropakine.

Est-ce que le corps peut être sensible à la forme du médicaments : petites billes/ cachet ?
Est-ce qu’un adjuvant ou un autre élément peut interférer dans l’efficacité d’une molécule?
Est-ce qu’il aurait eut cette crise avec la même dose mais en Micropakine?
Est-ce qu’une maladie (infection urinaire) peut diminuer l’efficacité d’un traitement?

Une autre piste d’explication, hormis la mauvaise observance ?
merci.

Dr Elie Hantouche – Ven 19 Fév 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

QUESTION : MICROPAKINE VERSUS DEPAKINE CHRONO

En fait, ces 2 médicaments comportent le même principe actif le Valproate de sodium mais la galénique* est différente.

Dans le cas présenté, le fait de passer de Micropakine LP 250 à Dépakine 500 était motivé par un résidu de troubles émotionnels et attentionnels.
Le fait qu’une aggravation soit contemporaine de ce changement signifie que même la dose de 500 est isuffisante pour atténuer le trouble bipolaire.

L’autre hypothèse, moins probable mais possible, est une intolérance à la dépakine 500 qui rarement peut induire des symptômes maniformes (qui ressemblent à une Manie) dans ce cas, l’intolérance est transitoire.
Afin de régler ce problème, le plus simple est de passer à Micropakine LP 500 (répondre à la question d’intolérance à Dépakine) – attendre encore 4 à 6 semaines, délai d’action du Valproate

– puis éventuellement adapter le traitement une fois le taux plasmatique du Valproate vérifié (c’est une prise de sang à faire 12 heures après la prise du traitement) :
> soit augmenter la Micropakine,
> soit ajouter une petite dose de sédatif majeur contre l’irritabilité (comme 1 mg de Risperdal)

NDLR BICYCLE : * Galénique :
Une forme galénique (ou forme pharmaceutique ou encore forme médicamenteuse ; le terme « forme posologique » n’est pas recommandé car c’est un calque de l’anglais dosage form) du nom de Claude Galien,
désigne la forme individuelle sous laquelle sont mis les principes actifs et les excipients (matières inactives) pour constituer un médicament.

Elle correspond à l’aspect physique final du médicament tel qu’il sera utilisé chez un patient : comprimés, gélules, sachets, solutions

buvables, suspensions injectables, etc.

Les noms des formes pharmaceutiques ont été harmonisés en Europe afin d’éviter les confusions et éventuellement les erreurs de manipulation1.
Par exemple, un liquide oral tel qu’un bain de bouche, qui ne doit pas être avalé, ne doit pas être confondu avec une solution buvable.


Source WIKIPEDIA

Quand on donne a un enfant un traitement à un jeune age :
Que se passe-t’il à long terme ?
Y aura t’il au bout de 7, 10 ans une baisse d’efficacité ?
Devra t’il augmenter les doses? Passer à une autre molécule?
Est ce que c’est la même chose pour la Dépakine et le Lithium ?

Dr Hantouche. – Lun 15 Mar 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

Excellentes questions légitimes mais auxquelles on ne dispose pas de réponses claires et certaines. Déjà, la BPJ pose un problème de définition et de reconnaissance.

Quant aux traitements, il est important de rappeler que les médicaments sont importants mais pas suffisants.

Les médicaments doivent en premier traiter les épisodes aigus, maniaques, dépressifs ou mixtes. Une fois la rémission obtenue, la poursuite du traitement « primaire » (ou principal) est nécessaire sur une période de 6 à 12 mois pour s’assurer de la fin de l’épisode. Le but est de réduire le risque de rechute, c’est-à-dire le retour des symptômes du dernier épisode traité. Si l’épisode n’est pas correctement soigné (présence de symptômes résiduels ou arrêt prématuré du traitement), le risque de rechute est assez élevé.

Reste la question du traitement au long cours. Dans ma pratique, la BPJ est liée à une cyclothymie, à savoir une labilité extrême persistante avec ou sans épisodes (hypo)maniaques et dépressifs. Dans ces cas, le traitement doit assurer au long cours une stabilisation (au moins une atténuation) de cette labilité.

Le choix du traitement tient compte des particularités de la BPJ. Les sels du lithium ne semblent pas le meilleur choix. En revanche, les anti-convulsivants, comme Dépakine®, Dépamide®, Dépakote® ou Micropakine®, offrent plus d’avantages, car plus efficaces dans les cas à cycles rapides, à forte instabilité, avec comorbidité anxieuse. De plus, l’absence de sevrage en cas d’arrêt brutal (ce qui n’est pas le cas pour le lithium ; attention aux arrêts et oublis qui sont assez fréquents chez les jeunes BP), la maniabilité et le faible risque de toxicité, sont des avantages en faveur des anti-convulsivants.

Dans la pratique, on assiste à une variété de réactions au traitement allant d’une excellente réponse à une absence totale ou partielle d’amélioration, et parfois à des effets indésirables compromettant la poursuite du traitement.

La question posée : que devient l’effet positif du traitement au-delà de 5 ans ?
A ma connaissance, il n’y a pas d’étude permettant de répondre à cette question.
Dans ma pratique, j’ai des jeunes soignés sur des périodes dépassant 10 ans. En cas d’excellente réponse initiale, l’effet du traitement se maintient dans le temps et souvent avec de faibles doses.
D’autres cas nécessitent dès le début, un traitement complexe (échec à la monothérapie par valproate) comme une combinaison de TR + antidépresseur + neuroleptique (ou antipsychotique).
En effet, les récidives dépressives bipolaires sont plus difficiles à prévenir que les récidives maniaques. Le Lamictal® semble être prometteur dans cette indication mais j’ai dans mon expérience, peu d’enfants soignés avec Lamictal®.

Cas de figure :
jeune bipolaire bien stabilisé pendant 1 à 2 ans, qui manifeste un retour de la BPJ : Que faire ?

En premier s’assurer de la prise régulière du traitement, éventuellement faire un dosage sanguin du traitement (Dépakinémie).
La solution la plus simple et logique est d’augmenter les doses (en tenant compte du poids qui varie avec le temps et de la nature des symptômes nouveaux)
Il n’est pas recommandé de changer de traitement, notamment quand on a obtenu un bon résultat au début du traitement. La deuxième solution serait d’ajouter un autre traitement ; p. ex.
– Lithium en cas de rechute (hypo)maniaque ou signes d’impulsivité et troubles des conduites
– Antidépresseur en cas de rechute dépressive majeure ou comorbidité anxieuse (attaques de panique, TOC…)
– Psychostimulant (Ritaline® ou Concerta®) en cas de signes en faveur d’un trouble de déficit d’attention

Traitement au long cours avec valproate versus Lithium

Il est connu chez les adultes jeunes qu’un traitement au long cours avec Lithium est susceptible de faiblir avec le temps (entre 2 à 5 ans, l’effet prophylactique du lithium seul autour de 20-40%). Avec le valproate, on observe moins de tolérance ou d’échappement thérapeutique avec le temps.
Pour certains experts, la meilleure protection au long cours est garantie par une combinaison de 2 TR (AC + Li).

Conseil : chaque rechute sous traitement psychotrope est une occasion de vérifier certains points essentiels
– le diagnostic de BPJ est-il approprié ?
– y a-t-il une co-morbidité non repérée au début du traitement (p. ex. TDAH), un abus de substances illicites ou une affection somatique associée (p. ex. trouble de la thyroïde) ?
– existe-t-il des troubles neuro-cognitifs comme une dyslexie ou un trouble du développement ?
– le traitement prescrit est-il adéquat (type, dosage, taux plasmatiques) ?
– y a-t-il besoin d’instaurer une psychothérapie ?
– si une psychothérapie est en cours, est-elle adaptée à la BPJ ?
– est-ce qu’il existe une intolérance au traitement en cours ?
– est-ce que les consignes de la thérapie sont-elles bien appliquées ? votre enfant a-t-il une bonne hygiène de sommeil ? est-ce qu’il consomme trop de stimulants (p. ex. caféine)
– existe-t-il des conflits actuels au sein de la famille ou à l’école ?

A t’on des données, pour savoir si la maturité du cerveau, vers 21 ans, permet d’arrêter le traitement ?
D’autant que nos enfants vont être plus que sensibilisé à l’hygiène de vie, a leur cyclothymie.
Si on arrête le traitement à maturité du cerveau, risque t’on en cas d’échec lors de la reprise du traitement que celui-ci fonctionne plus ou moins bien ?
Merci.

Dr Hantouche – Lun 15 Mar 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

La décision d’arrêter un traitement thymorégulateur, qui a fait ses preuves d’efficacité au long cours, est toujours difficile à prendre. Souvent, c’est le jeune ou sa famille qui prend cette décision – parfois légitimée par le souci de savoir si le jeune est « guéri » de sa BPJ, donc capable d’être bien sans rien.
La plupart du temps, ce genre d’arrêt s’accompagne de rechute systématique dans les 3 à 6 mois après.

Je recommande que cette décision soit largement discuté avec le prescripteur et le psychologue – Dans tous les cas, on baisse les doses jusqu’à un niveau acceptable sur le plan de la tolérance (pas d’effets indésirables) et de l’efficacité (maintien de l’effet sur l’instabilité, l’impulsivité, la colère, l’hyperréactivité…).

De toute façon, la décision de réduire les doses ou arrêter le traitement doit se faire dans des conditions optimales : absence de conflit en famille ou à l’école ; absence de stress ou de changement majeur (ex. déménagement, changement d’école) attendu dans les 6 mois à venir ; excellente hygiène de vie ; psychothérapie en cours ;

Cela dit, dans la pratique, on assiste à de nombreux cas où le traitement est arrêté et on doit faire avec. En effet, on ne peut pas imposer un « traitement à vie ». Parfois les rechutes post-arrêt font convaincre le jeune et sa famille de l’utilité du traitement prophylactique dont le but est de « rester bien » (souvent difficile à accepter chez un jeune qui va bien depuis 1 à 2 ans – la tentation d’arrêt est souvent présente).

En cas de rechute post-arrêt, la reprise du traitement assure de nouveau des bénéfices sauf dans le cas du lithium où des arrêts répétés sont susceptibles de réduire son efficacité

Au sujet de la question de la « maturité du cerveau » et réactivité aux psychotropes : on sait qu’à un jeune âge, le cerveau ne répond pas aux psychotropes agissant sur la noradrénaline (certains antidépresseurs). En revanche, il est sensibles aux médicaments actifs sur le GABA (anti-convulsivants), la dopamine (antipsychotiques ou stimulants) et la sérotonine (antidépresseurs type ISRS).

Enfin, la maturité du cerveau permet-elle une stabilisation sans médicament ?
Sur ce point, je peux affirmer que non ; on sait que la BPJ est toujours présente notamment dans sa forme instable cyclothymique. Un bon travail psychologique et éducatif avec les parents et le jeune permet souvent la protection du jeune dans son développement, ses études et son accès à l’âge adulte. Mais question de potentiel de rechute, rien n’est certain
– une vigilance s’impose !

Quelle est la conduite à tenir (hormis adapter le traitement), pour nous parent d’enfants cyclothymiques, quand notre enfant exprime des envies de mort, d’en finir. Doit-on minimiser/pallier, le temps que la phase critique passe, vu que c’est assez rapide chez un enfant cyclo?

Comment distinguer si c’est de la provocation ou pas ?
Si c’est de la provocation, que préconisez vous ?

merci.

Marc Spund – Ven 9 Avr 2010
Psychologue TCC – EMDR – victimologue

Quelle est la conduite à tenir (hormis adapter le traitement), pour nous parent d’enfants cyclothymiques, quand notre enfant exprime des envies de mort, d’en finir.
Doit-on minimiser/pallier, le temps que la phase critique passe, vu que c’est assez rapide chez un enfant cyclo? Comment distinguer si c’est de la provocation ou pas? Si c’est de la provocation, que préconisez vous ?

  • Aborder directement la question avec lui ; lui demander clairement s’il pense à mourir.
  • Écouter et permettre l’expression de sa peine, et ce même si la situation semble superficielle.
  • Vérifier ses connaissances sur le suicide (se tuer), demandez des précisions sur sa façon de vouloir se tuer.
  • Rassurer l’enfant de notre présence, être patient permet à l’enfant de se sentir en confiance et de se confier.
  • L’impliquer dans la recherche de moyens d’améliorer la situation. Que peut-il faire lui-même ?
  • Qu’attentive du parent ? Comment faut-il que les choses se passent ?
  • Valoriser chacun de ses succès afin de souligner ses capacités et ses efforts.
  • Aider l’enfant à développer ses habilités à résoudre ses problèmes.
  • Encourager l’enfant à poursuivre ses activités et loisirs.
  • Établir une liste de personnes ressources qui peuvent l’aider au besoin et aviser ces dites personnes de la situation.
  • Inviter l’enfant à chaque fois qu’il pense vouloir mourir, le dire à une personne de confiance (dont le parent).
  • Refléter à l’enfant notre position que nous pensons que se suicider n’est pas une solution.

Les enfants suicidaires ont souvent tendance à se dévaloriser dû à un manque d’estime de soi et ils sont souvent l’objet d’hostilité, et de colère de la part des autres jeunes ou d’adultes. Les crises suicidaires sont souvent précipitées par une perte ou par une série de pertes.
Il est approprié d’enseigner aux enfants, ce qu’il en est vraiment du suicide, même en bas âge.
Parler de la vie et de la mort aux enfants peut-être aussi un moment pour prendre le temps avec eux d’observer les feuilles tombées en automne et de voir naître les bourgeons au printemps.
La prévention la plus importante consiste d’abord à parler du problème, de briser le silence et l’isolement dans lesquelles se trouve l’enfant qui pense au suicide.

Choisir un moment sans trop attendre, pour lui parler, installer un climat de confiance, d’authenticité et non de jugement. Exprimez votre inquiétude en lui reflétant les éléments que vous avez remarqué qui vous inquiète qu’en pensent-ils ? Demandez-lui s’il pense au suicide. Si oui pense-t-il à un moyen de le faire, où et quand ? Ceci aidera à connaître l’état d’urgence.

Demandez-lui ce qu’il fait à ce point mal pour vouloir s’enlever la vie. Laissez-le parler, essayer de comprendre ce qu’il vit, écoutez-le, croyez ce qu’il dit, rassurez-le qu’il n’est pas fou, c’est plutôt qu’il a très mal et qu’il a une crise qui ne va pas durer toujours.
Vous pouvez poursuivre la discussion en lui posant diverses questions, par exemple aimerais-tu voir changer quelque chose dans ta vie ?
Penses-tu que c’est plutôt un besoin de faire baisser ta souffrance que de vouloir mourir ?
Quels moyens as-tu utilisé pour diminuer ta souffrance ?
Quel résultat cela a donné ?
Es-tu prêt à faire pour te donner les moyens de régler des problèmes (ou traverser ta souffrance) ?

Les enfants de 8 ans ont une compréhension élaborée du suicide. Si ce n’est pas le terme de suicide qu’il connaisse, ils savent ce que veut dire se tuer et souvent dès l’âge de six ans.

Doit-on minimiser/pallier, le temps que la phase critique passe, vu que c’est assez rapide chez un enfant cyclo ? Comment distinguer si c’est de la provocation ou pas ? Si c’est la provocation, que préconisez-vous ?

Les idées suicidaires verbalisées par les enfants méritent une évaluation particulière et ne doivent pas être banalisées. Il faut faire attention de bien analyser les paroles. Lorsqu’un enfant tient des propos suicidaires ou morbides, une consultation avec un Psychologue clinicien ou un Pédo-Psychiatre devient nécessaire. On ne sait jamais trop ce qu’il y a en dessous de cela.
Ça peut être une verbalisation impulsive de la part d’un enfant qui n’a pas nécessairement d’intention suicidaire, mais parfois, il y a des enfants qui sont aux prises avec des psychopathologies importantes ou des situations personnelles extrêmes qui sont franchement très désespérées.

L’enfant ne comprend pas la mort comme un adulte. Quand un enfant parle de la mort, de sa mort, il faut s’attarder à ce qu’il veut dire sans pour autant dramatiser ce que l’enfant dit. Il y a très peu d’enfants qui passent à l’acte, mais il est important de ne pas être soulagé juste par le fait que ça se passe rarement, parce que le seul fait d’en parler est un appel à l’aide.

Il n’est pas normal qu’un enfant de 6 à 12 ans parle d’un attrait envers la mort. Beaucoup d’enfants expriment des fantaisies suicidaires qui évoluent en fonction de l’âge, sans être pour autant des enfants suicidaires. La mort attire leur curiosité, prend une place importante dans leur mode imaginaire. Les fantaisies suicidaires deviennent une décomposent de l’activité psychique « normale » de l’enfant. Les enfants les mettent en scène dans leurs jeux ou horreur et humour se rejoignent de manière sublimée comme pour le jeu du « pendu ».

Provocation ou non, il faut toujours prendre ce genre de propos au sérieux et lui demander tout simplement pourquoi il veut mourir. Le faire parler….

Bonjour,
L’enfant de 8 ans dont je suis l’AVS, et que je soupsonne fortement d’être bipo m’a dit avoir eu une sorte d’hallucination : il s’est reveillé une nuit, et là, il a vu apparaître sur le mur de sa chambre le visage de sa grand mère, décédée depuis 4 ans… ça lui a fait très peur! Il s’est demandé s’il devenait fou, et j’ai donc tenté de le rassurer au mieux.
Est ce vraiment une hallucination? Si oui, quelles en sont, ou quelles peuvent être les conséquences et les causes de cette vision?
Est-il fréquent chez un enfant cyclo d’observer ce type de phénomène, et auquel cas, comment le rassurer et éviter que cela devienne une source d’angoisse?
Enfin, qu’entend-t-on exactement par hallucination?

Je vous remercie d’avance pour votre réponse

Docteur Elie Hantouche – Lun 3 Mai 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

L’hallucination est définie comme étant une « perception sans objet », et plus précisément selon Henri Ey comme une « perception sans objet à percevoir » (absence de stimulus extérieur).
Elle se distingue d’une illusion, qui est une perception anormale d’un vrai stimulus externe. Les hallucinations peuvent toucher tous nos sens – vue, ouïe, odorat, toucher et goût – isolément ou simultanément.
Les hallucinations auditives sont les plus fréquentes ; plus rares, sont les hallucinations visuelles.
Les hallucinations sont des symptômes typiques d’une pathologie psychiatrique (notamment une psychose, comme la schizophrénie ou la psychose hallucinatoire chronique).

Dans la BP juvénile et lors des épisodes maniaques, on peut observer la survenue d’hallucinations (dans plus de la moitié des cas). La présence de tels symptômes rend parfois le diagnostic difficile entre une BPJ et un début de schizophrénie, notamment chez les jeunes adolescents (entre 12 et 16 ans).
Dans tous les cas, la présence d’hallucinations visuelles, doit faire rechercher des causes organiques (affection neurologique, une épilepsie, une tumeur…), une pathologie du sommeil (narcolepsie) ou intoxications par des drogues.

Enfin il y a des hallucinations visuelles qui ont lieu au moment de l’endormissement ou au réveil. Elles sont souvent angoissantes et ne signifient pas la présence d’une pathologie mentale.

Dans le cas mentionné, l’hallucination est survenue une fois en plein sommeil. Elle peut traduire un réveil d’un cauchemar ou une attaque de panique nocturne. De plus, l’enfant voit sa grand-mère, décédée il y a 4 ans – ce qui peut traduire une angoisse de séparation (fréquente chez les jeunes BP cyclothymiques). Dans ce cas, on peut désigner ce phénomène passager d’hallucination visuelle transitoire à distinguer des hallucinations typiques des psychoses ; celles-ci sont plus fréquentes, surviennent à n’importe quel moment de la journée et concerne des gens inconnus qui persécutent le patient, ou associées à un délire…

Dans la BPJ, il n’est pas rare d’observer des troubles de la pensée qui peuvent aller jusqu’aux idées délirantes et aux hallucinations. Les hallucinations auditives sont plus fréquentes que les hallucinations visuelles et se rapprochent des idées fixes obsédantes. L’enfant se plaint d’avoir comme un son (ou une chanson) permanent dans sa tête dont il est impossible de se débarrasser.
De temps en temps, ce sont des scènes ou des images d’horreur qui hantent le jeune BP (comme voir des corps déchiquetés), des scènes sexuelles (comme voir des sexes dans les portraits de ses parents) ou de crime (comme voir sa mère poignardée lors de ses déplacements).
Des phénomènes qui ressemblent à des obsessions et tourmentent le jeune BP.

Il est important de savoir que ces hallucinations induisent rarement un passage à l’acte. La plupart du temps, le jeune BP a honte de ces phénomènes ou pense qu’il est devenu fou. À côté de ces hallucinations, on observe des pensées magiques de possession ou de référence, teintées souvent de mégalomanie.

Ces phénomènes surviennent au cours des épisodes d’excitation maniaque, plus rarement en phases dépressives (parfois sous l’effet d’un traitement antidépresseur).

La conduite à tenir dans ce cas :

  • s’inquiéter si le phénomène se reproduit à nouveau
  • faire un bilan diagnostique pour savoir la nature du trouble (s’il existe un soupçon de bipolarité, il convient de le confirmer par un bilan clinique adapté)
  • faire un bilan neurologique si l’hallucination demeure visuelle
  • en l’absence de trouble, il suffit de rassurer le jeune qu’il n’est pas fou, l’écouter, lui faire parler de sa grand-mère ou d’autres problèmes actuels qui le stressent…

=> Mon fils de 14 ans sous Dépakine a essayé de boire de l’alcool avec ses copains.
Visiblement il n’y a pas eut de problème (quoique il est UP depuis).
Pour lui tant qu’il n’est pas saoul, ce n’est pas grave.

Pouvez-vous nous dire quels sont les risques exacts qu’il encourt?
Est-ce que l’alcool bloque les effets du Valproate?
En soirée peut-il boire un verre d’alcool « pas fort » (une bière par exemple) ?
merci.

=> mon fils de 15 ans est sous Dépakine, Risperdal et Ludiomil, qu’en est-il de la consommation d’alcool car je suis confrontée au même problème : tant qu’il ne se passe rien il pense que ce sont des histoires.

Dr Elie Hantouche – Mar 15 Juin 2010
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

Ce qu’il faut savoir en premier c’est que les jeunes bipolaires ou cyclothymiques ont une appétence à l’alcool qui est plus importante et fréquente que les autres.
Et la consommation d’alcool est plus accentuée dans les phases hypomaniaques.
Donc, pas étonnant qu’après une consommation massive d’alcool que le jeune soit en phase « Up » (soit il a bu parce qu’il était déjà en hypomanie soit l’alcool a induit un virage vers l’hypomanie)

En second, concernant les jeunes BP ou cyclothymiques qui sont sous traitement type acide valproïque (Dépakine / Dépakote / Dépamide), la consommation d’alcool est fortement déconseillée au début du traitement.

Une fois le traitement maintenu au long cours (ce qui est le cas classique chez les jeunes BP/cyclo), le même conseil renouvelé.
Cependant, les jeunes sortent et ont envie de faire la fête…
Pour cela, on leur explique que le traitement avec l’acide valproïque potentialise les effets de l’alcool
(c-à-d avec ce traitement, un verre d’alcool aura l’effet de deux verres = c’est le résultat de ce qu’on appelle une interaction dynamique entre médicament et alcool)

Dans le sens inverse, est-ce que l’alcool exerce un effet négatif sur les effets du traitement de la BP – Cyclothymie ? 

Une intoxication alcoolique aiguë (cuite) tend à inhiber le métabolisme médicamenteux, donc risque d’accumulation du traitement et augmentation de ces effets sur la vigilance (donc éviter les consommations excessives d’alcool à tout prix)

En revanche, une consommation régulière d’alcool entraîne une induction enzymatique au niveau du foie et risque de faire éliminer rapidement le traitement.
De plus, la consommation d’alcool au long cours diminue l’activité du GABA dans le cerveau (gaba = neurotransmetteur calmant que lequel agit l’acide valproïque).
Ainsi, la consommation d’alcool est capable de réduire l’efficacité du traitement de deux manières :
élimination rapide de l’organisme et blocage de son effet stabilisateur.

Enfin, pour répondre à la question 2 (prise Dépakine + Ludiomil + Risperdal), l’alcool est susceptible d’aggraver les effets sédatifs de cette combinaison de médicaments (somnolence, baisse de la concentration, trouble de l’attention…) qui ont un effet dépresseur du système nerveux central. Cette aggravation s’explique par une synergie additive ou une potentialisation.

Enfin, on peut mentionner que l’association de certains médicaments avec l’alcool peut provoquer l’apparition de chaleur, rougeur, vomissements, hypotension, tachycardie, ces manifestations constituant ce que l’on appelle l’effet antabuse(*).

Ces médicaments sont nombreux, les principaux appartenant à la classe des antibactériens (céfamandole, céfopérazone, céfotétan, latamoxef, chloramphénicol, métronidazole), des antifongiques (griséofulvine, kétoconazole, nitroimidazolés), aux sulfamides hypoglycémiants (chlorpropramide, glibenclamide, glipizide, tolbutamide) et bien sûr le disulfirame (Espéral®), utilisé justement dans le traitement antabuse de l’alcoolisme.
Ces molécules sont des inhibiteurs de l’acétaldéhyde-déshydrogénase, l’élévation de la concentration en acétaldéhyde étant responsable de ces symptômes.

Les médicaments utilisés dans le traitement de la cyclothymie n’ont pas d’effet antabuse.

NDLR BICYCLE : Précision sur l’effet antabuse :
L’effet antabuse se caractérise par différents symptômes : flush, bouffée vasomotrice, vasodilatation, céphalée (pulsatile), nausée, vomissement, tachycardie, dyspnée, hypersudation, vertige, étourdissement, vision floue, malaise, lipothymie, modification de l’électrocardiogramme, douleur thoracique, confusion mentale et ataxie.
Il est provoqué par l’absorption concomitante d’alcool et de certaines substances médicamenteuses, en particulier le disulfirame. La présence de cette substance dans certains produits d’usage courant (lotions après rasage, gels au goudron, shampooing contenant de la bière, solution pour lentilles de contact contenant de l’alcool polyvinylique) peut également provoquer cet effet indésirable.
La consommation de certaines espèces de Coprins peut également provoquer l’effet antabuse.
Cet effet peut toutefois être recherché dans le cadre du traitement de l’alcoolisme chronique afin d’associer une sensation de dégoût à l’absorption d’alcool.

Physiologiquement, l’éthanol est transformé in vivo en éthanal (Aldéhyde) à son tour transformé en acide acétique. La substance provoquant l’effet antabuse agit sur le foie pour empêcher la conversion de l’éthanol en acide acétique par l’acétaldéhyde déshydrogénase. Il y a alors une accumulation d’acétaldéhyde, toxique pour l’organisme.

Source Wikipédia

Mon fils est sous Lamictal depuis 4 mois suite à des crises d’épilepsie survenues pour la première fois lorsqu’il avait 3 ans (il y a un an et deux mois) il a 4 ans et est enfin stabilisés (plus de crise) depuis début mai après plusieurs traitements sans succès (Mikropakine, Tegretol, Urbanyl, Keppra) seul Lamictal a mis un terme aux convulsions Tonicaux Cloniques qu’il faisait.

En revanche depuis qu’il a cette maladie son comportement a radicalement changé, auparavant il était très calme, très posé, concentré dans ce qu’il faisait et hyper facile à éduquer et depuis le début des crises et ses différents traitement c’est tout l’inverse il est très dissipé, bouge et parle sans cesse a de grosses difficultés à ce concentrer, son humeur est très changeante très passionné par tout mais rien ne dure jamais, il est hyper émotif a du mal à se faire des amis bien qu’hyper sociable.
Il est suivi par un psychomotricien et il a une AVS à l’école.

Je voulais savoir s’il était fréquent que les enfants épileptiques soient plus sujet à la bipolarité ? Je précise que j’ai un père et un demi-frère Bipolaire et traité depuis des années pour cela. Ca me fait peur quant à l’avenir de mon fils, la neuropédiatre va me mettre en relation avec une neuropsychologue pensez-vous qu’on peut d’hors et déjà faire une évaluation pour poser un diagnostique sur une bipolarité ?
Merci de votre aide.

Dr E Hantouche – 26/09/2011
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

En premier, il n’y a aucun lien significatif entre épilepsie et bipolarité.

Cela semble paradoxal quand on considère que la majorité des alternatives au lithium sont des anti-convulsivants comme Dépakine, Dépakote, Dépamide, Tégrétol, Trileptal, Lamictal…

Cela dit, le cas présenté soulève la question du diagnostic de bipolarité chez un jeune qui, en plus de son épilepsie, présente des dérèglements émotionnels et énergétiques qui ne sont pas réduits par Lamictal, malgré l’efficacité de celui-ci sur les crises épileptiques.
Cette constatation écarte la possibilité de troubles psychiques secondaires ou liés à l’épilepsie.

Un bilan clinique détaillé explorant la cyclothymie et autres troubles comme le déficit de l’attention est fortement indiqué dans ce cas – En effet, les signes décrits collent bien avec une cyclothymie (ou bipolarité juvénile). Curieux que la neurologue soit indifférente à ces troubles – son « job » ne se limite pas à bloquer l’épilepsie – elle peut très bien tenter de comprendre la nature des troubles émotionnels et attentionnels de son jeune patient – surtout que le TDA et la cyclothymie sont des entités qui peuvent être soignées en neurologie ou demander l’avis d’un collègue pédopsychiatre connaisseur de ces troubles.

Donc il faut explorer la piste de la cyclothymie notamment du fait de l’histoire familiale positive (2 cas bipolaires) – en cas de diagnostic positif de bipolarité juvénile, le lamictal seul ne semble pas apaiser la circularité des crises – il est recommandé pour les jeunes BP d’utiliser le valproate – celui-ci est plus adapté et son usage avec Lamictal permet de réduire de moitié la dose de celui-ci en raison de son interaction cinétique sur l’élimination de lamictal. Ainsi, en prenant 200 mg, on aura l’effet initial de 400 (sauvegarde de l’effet sur les crises tonico-cloniques) en plus d’un effet stabilisateur du valproate.

La possibilité d’ajouter le lithium est à envisager en cas d’échec du valproate

L’échec du valproate peut orienter vers la piste du TDA – l’avis d’un expert de la question serait souhaitable (envisager un traitement avec le méthylphenidate : Ritaline ou Concerta) – mais le jeune n’a que 4 ans – pour cela, l’avis d’un pédopsychiatre expert du TDA sera sollicité

Reste une dernière hypothèse en rapport avec un effet adverse possible du Lamictal qui dans certains cas peut induire des états d’excitation, de panique, d’agitation voir même induire des syndromes obsessionnels. Dans ce cas il convient de réduire la dose et introduire un autre anticonvulsivant capable de réduire cet effet adverse. J’ai constaté cet effet chez les adultes jeunes – je n’ai jamais eu l’expérience du lamictal chez les enfants bipolaires.

http://www.ctah.eu/espaces.php?ref=1/3/24/1020

Certains de nos enfants sont à l’âge de la mobylette et de la conduite accompagnée.

Qu’en est-il de l’influence des médicaments, alors qu’il est spécifié sur les notices de ne pas conduire?

Avec la Dépakine, le lithium ou le lamictal?
Avec le Risperdale?
et d’autres spécifiquement?

Doit-on prévenir les moniteurs d’auto-écoles?
Doit-on dire non à une mobylette ???

Merci

Dr Sophie CLERMONT-GAILLARD – 11 janvier 2012
Médecin généraliste agréé par la Préfecture de la Somme pour l’aptitude à la conduite automobile.

A titre d’information:

Pour ce qui est du permis B ( véhicules légers), la conduite sous médicaments psychotropes peut évidemment poser problème, tout dépend de la posologie et du mode d’administration de ces traitements. Il faut en discuter avec les médecins prescripteurs, afin d’évaluer le degré de somnolence induit par ces médicaments, et privilégier, en cas de conduite, une prise de ces traitements plutôt le soir (neuroleptiques sédatifs comme le Risperdal, anxiolytiques benzodiazépines et autres somnifères tels Xanax, Lexomil, Seresta, Stilnox,…). A ma connaissance, le lithium ne provoque pas de somnolence majeure, ni les autres antidépresseurs. Les thymorégulateurs appartenant à la classe des antiépileptiques (Dépakine et Lamictal), ne posent a priori pas de problème non plus.

A noter tout de même que cela dépend aussi des associations entre ces différents médicaments, qui peuvent parfois potentialiser leurs effets sédatifs.

Il va de soi que la consommation concommittante d’alcool ou stupéfiants et de médicaments psychotropes est formellement contre indiquée avec la conduite ! (potentialisation majeure du risque de somnolence).

Par prudence pour votre enfant et pour les autres usagers des voies publiques, il est préférable de signaler à l’examinateur du permis de conduire, à qui tous les graves problèmes de santé doivent être signalés, la prise de ces traitements . C’est lui qui décidera alors de l’utilité de faire convoquer le candidat devant la Commission médicale agréée par la préfecture du département, lesquels médecins jugeront de l’aptitude du candidat.

Les recommandations de prudence sont les mêmes pour la conduite des 2 roues, qui à mon sens nécessite la même vigilance que pour celle d’un véhicule léger, même si elle n’est soumise à aucun examen médical obligatoire.

Pour ce qui est des permis EB, C EC D ED (conduite des véhicules lourds type remorques, poids-lourds, transports en commun, transport de personnes), les exigences sont beaucoup plus dures, et tout traitement potentiellement sédatif dont l’horaire de prise pourrait agir sur la vigilance contre indique formellement leur obtention. Un examen par un médecin agréé est de toutes façons systématiquement réalisé avant l’inscription à ces permis.

Les jeunes conducteurs tuent. Combattez la consommation d’alcool et de stupéfiants avant de conduire, ainsi que la vitesse.

Dr SCG

Bonjour,
Les cyclothymiques sont hyperémotifs, nous le savons tous particulièrement bien. Mais l’hyperémotivité peut-elle exister sans la cyclothymie ? Se manifeste-t-elle de la même manière sans cyclothymie qu’avec cyclothymie ?

Dr Frédéric KOCHMAN, pédopsychiatre, Lille Le 12/03/2012
Pédopsychiatre spécialiste des enfants et adolescents hyperactifs et ayant un trouble de l’humeur

Bonjour et tout d’abord ravi de participer à votre forum : très riche, actif et réactif.

Clairement, certaines personnes sont hyperémotives de nature, mais sans cyclothymie, avec donc une humeur relativement stable.

Il s’agit alors dans la plupart des cas de formes d’hyperémotivité anxieuse et non pas cyclothymique. Par exemple de grands timides hyperémotifs, mais non forcément cyclothymiques. De ce fait, l’hyperémotivité non cyclothymique est de nature beaucoup plus anxieuse : grande anxiété sociale, attaques de panique, spasmophilie.

Comme vous le savez, l’hyperémotivité cyclothymie est beaucoup plus liée à une dimension empathique, compassionnelle, dont relationnelle et interpersonnelle : en larmes à la moindre scène empathique au cours d’un film, hypersouci de l’autre et inquiétudes en rapport.

Au total et de manière certes un peu caricatural, l’hyperémotif anxieux vit dans le souci de lui-même tandis que l’hyperémotif cyclothymique vit dans le souci des autres.

Bien à vous,

Dr Frédéric KOCHMAN, pédopsychiatre, Lille

Bonjour,
Nous souhaiterions en savoir un peu plus sur les réactions paradoxales aux médicaments que certains enfants présentent.

Nous connaissons les risques de virages de l’humeur avec les stimulants (Ritaline etc…) et les antidépresseurs. Mais il semble que les thymorégulateurs ne sont pas neutres non plus.

Certains enfants Asperger/cyclo sont extrêmement sensibles au médicaments et parfois ne les supportent pas du tout, sait-on pourquoi?

Est-ce que l’on observe la même chose chez les enfants uniquement cyclothymique ?

Pourquoi certains enfants, alors qu’il y a eut une période d’accalmie, redevienne « speed » avec la dépakine/micropakine.

Enfin, pourquoi beaucoup ont des effets secondaires même pas présent sur la notice au début du traitement, est-ce que l’anxiété de la nouveauté est une réponse valable?

Quelle est la marche à suivre ?

merci.
Les mamans Bicycle.

Dr Elie Hantouche, CTAH Paris Le 21/09/2012
Psychiatre spécialiste des troubles anxieux et de l’humeur

Pour répondre à ces questions, prenons l’exemple d’un jeune cyclothymique chez qui un traitement par valproate (dépakine, dépakote, micropakine, ou dépamide) a été instauré.
Dans la pratique on peut observer toute sorte de réaction

  • dans la majorité des cas, on observe une amélioration de l’agitation, de l’impulsivité émotionnelle et de l’hyperactivité hypomaniaque ; c’est un effet en aigu qui peut nécessiter un délai de 2 à 4 semaines ; mais l’effet attendu est une stabilité au long cours avec atténuation de l’amplitude des oscillations des niveaux de l’énergie, activité et humeur.
  • dans certains cas, il n’y a pas de réponse ; en effet, il n’y aucun remède qui garantit 100% de réponse notamment quand c’est la cyclothymie qui est la cible – ce n’est pas comme soigner un épisode aigu mais il s’agit d’un traitement au long cours pour un trouble chronique
  • rarement on note une « réaction paradoxale » dite maniforme – c’est-à-dire une accentuation de l’agitation (qui ressemble à la manie) – c’est rare mais ça peut arriver – Dans ma pratique, j’ai observé cette réaction chez les jeunes qui présentent en même temps des signes de cyclothymie et du trouble de déficit de l’attention. Dans ces cas, on arrête le valproate et on instaure un traitement spécifique du trouble de l’attention (methylphénidate).

    QUESTION 2 : au sujet des cas de réactions maniformes paradoxales qu’il a déjà vu avec le Valproate, mais transitoires, svp? Quand il dit que c’est transitoire, cela veut dire combien de temps, en général, svp
    Réponse : « transitoire » = en moyenne la première semaine du traitement

Prenons un autre exemple : un jeune cyclothymique traité par valproate et qui réagit bien sur une période de temps puis manifeste de nouveau des signes de cyclothymie ; dans la plupart des cas, il s’agit d’une mauvaise observance du traitement qu’il convient de corriger. Si l’observance est correcte, on pratique un bilan sanguin pour vérifier le taux plasmatique du valproate ; car dans certains cas, la dose est faible (par souci de ne pas induire des effets secondaires). Si le taux plasmatique du valproate est bas (p. ex. moins que 35µg/l) on augmente la dose du traitement. Enfin rappelons que la cyclothymie évolue de manière capricieuse et qu’aucun traitement n’est capable d’assurer une réponse constante au long cours, d’où la nécessité d’un suivi régulier du traitement qui souvent doit être combiné avec une thérapie adaptée à la gestion émotionnelle pour les jeunes cyclothymiques.

Autre point : quand on parle de « virage » avec certains psychotropes, il s’agit d’un phénomène commun chez les jeunes bipolaires / cyclothymiques. Ce n’est pas un effet paradoxal mais un effet indésirable souvent lié à l’usage des antidépresseurs ou des stimulants. En plus, c’est un phénomène inhérent à la cyclothymie (des virages plutôt liés à l’évolution naturelle du trouble qu’induits par les psychotropes)

Un autre point concernant la « réaction excessive à la nouveauté » décrite chez les jeunes atteints de la maladie d’Asperger ; je ne sais pas si la fréquence (ou l’intensité) des effets secondaires des psychotropes soit liée à cette réaction – dans mon expérience avec quelques jeunes Asperger, montre que le valproate est souvent bien toléré – nettement mieux que les autres psychotropes.

Enfin en parlant d’anxiété et traitement psychotrope, je pense que ce sont les parents qui sont plus anxieux que les jeunes patients, quand on parle de médicaments psychotropes. Face à cette anxiété parentale, la solution est de s’informer, de poser calmement les bonnes questions et de ne pas réagir excessivement en s’opposant à un traitement susceptible d’aider le jeune patient Asperger et/ou cyclothymique.

Dr Elie Hantouche

Bicycle a participé à l’émission Allo-Rufo via 2 questions.
Préconisation : Eloigner ou placer l’enfant cyclothymique.

Question 1 : Mon fils de 16 ans est bipolaire. Il n’a pas beaucoup d’amis et accapare son petit frère. Dois-je intervenir ?

Mon fils de 16 ans a été diagnostiqué bipolaire à l’âge de 11 ans. Il est suivi par un psychiatre et suit une TCC (thérapie cognitivo-comportementale). Mais il a du mal à se faire des amis parce qu’il est violent, il a peur que les autres ne l’aiment pas. Du coup, il a une relation très exclusive avec son petit frère. Il veut dormir avec lui et celui-ci n’a pas le droit d’avoir d’autres amis. Pour moi, il est important que le petit ait sa vie à lui et qu’il ne se sente pas responsable de son aîné. Comment gérer cette situation ? Faut-il intervenir dans leur relation ?

Réponse de Marcel Rufo

Je ne trouve pas cela acceptable que le petit pâtisse des comportements anxieux et compensatoires du grand-frère. Il n’a pas à dormir avec son frère.
Il faut que l’équipe qui suit votre fils, réévalue le diagnostic et propose des aménagements de vie, voir un internat de semaine en laissant ainsi son jeune frère tranquille. On ne peut pas faire soigner le grand au détriment du petit.
La fondation des étudiants de France, par exemple, prend en internat des jeunes en prépa ou année universitaire, qui sont suivis sur le plan médical et psychologique, afin de les protéger d’eux-mêmes et de leur permettre de réussir.

=> http://www.france5.fr/emissions/allo-rufo/diffusions/19-09-2013_70693

Question 2 : Mon fils de 17 ans, diagnostiqué cyclothymique, est déscolarisé.
Depuis la 6ème je fais beaucoup pour éviter les risques suicidaires et les risques d’addiction et pour l’aider à s’intégrer dans la vie… L’hiver dernier, il était très dépressif et son lycée n’a pas souhaité qu’il continue une scolarité chaotique. Lui-même devenait de plus en plus phobique. Il a arrêté son traitement et ne s’en sort pas si mal, mais est très fragile, on peut rien lui dire ou avec beaucoup de précaution. Depuis 2 mois, il travaille 2 jours par semaine, mais se laisse un peu vivre.
J’ai pris l’option d’intervenir le moins possible pour le pousser à se responsabiliser et prendre petit a petit son autonomie. Ais-je raison d’agir ainsi ?

Discution avec de Marcel Ruffo

Ces jeunes fragiles, ont toujours besoin d’un cadre, Ils ne peuvent pas se gérer tout seuls, cela fait parti de leur pathologie.
Je comprends la position des parents de dire « débrouille-toi, gère-toi » mais ils ne peuvent pas.
Ce garçon qui est suivi, ne peut pas faire l’impasse d’une prise en charge style hopital de jour, style suivi régulier avec des équipes spécialisées qui le suivent, parceque sinon il ne peut pas s’améliorer.
« Il est hyper opposant, on a tenté plein de choses. »
Je n’ai jamais vu un garçon qui a des troubles de la personnalité qui soit favorable aux psys, c’est même un des signes les plus inquiètant que d’avoir cette crainte des psys.
« Il est contre la thérapie, mais va très volontier chez son psychiatre. Entre-temps il reste toujours très instable, je me demande quand il aura un déclic »
C’est déjà génial, cette relation de confiance et d’alliance avec son psy. Sauf qu’un psy tout seul ça ne sert à rien! Il faut aussi une institution, un hopital de jour ou il soit suivi, ou il doit y aller tous les matin pour construire son avenir, ce qu’il va faire et qu’on accompagne cette construction. Seul il n’y arrivera pas.
La chance d’avoir ce psy en qui il a confiance vous permettra de vous tourner vers lui pour trouver une solution institutionnelle associée à la prise en charge individuelle.
« Et cela va l’insérer? Je ne souhaite pas l’enfermer dans une institution, je voudrais qu’il soit comme tout un chacun »
Je ne vous propose pas vol au dessus d’un nid de coucou, je vous propose un accompagnement spécialisé parcequ’il en a besoin.
Et je répond à votre question très intérressante, que je comprends tout à fait : « on le laisse se gérer ». Et bien il ne se gèrera pas. Donc il faut l’accompagner.
…/… Je vous répond en terme de ce que j’ai vu comme évolution de ce type de garçons et de filles. Et je sais que ceux qui ont le plus réussis, c’est avec une triple prise en charge : psychologique, médicamenteuse et institutionnelle.
Avec ces 3 solutions, on a des perspectives d’évolution, dans un travail adapté, mais on réussi.

QUESTION d’INTERNAUTE :
Bonjour excusez moi de vous déranger je souhaiterais savoir quelque chose
ma mère est devenue épileptique à l’âge de 7 ans suite a un traumatisme crânien du à un accident.
A partir de la elle a commencé un traitement a la depakine ainsi qu’à la depamide puis elle a stoppé ces traitement à l’âge de 20 ans .

je souhaiterais savoir exactement si après l’arrêt de ceux si tout ce qui composent ces médicaments se trouvent encore dans le sang et durant combien de temps ?

D’avance merci en espérant que vous me répondrez
Cordialement : R . C

Réponse du Dr Coudé, pédiatre

le DEPAMIDE est transformé en valproate (DEPAKINE) en quelques minutes dans l’organisme.
L’existence de 2 spécialités releve du marketing. Une seule spécialité aurait suffi.

Le valproate a une demi-vie de 8-12h.
Il disparaît donc très vite de l’organisme.
L’effet d’induction enzymatique peut durer 2-3 semaines.

Dr François-Xavier Coudé – Aix en Provence le 17/02/2014
Pédiatre-chercheur ayant mené des recherches sur les effets du valproate à l’hopital Necker